Contre vents et marées: Soutien de la Fédération Anarchiste (FA) francophone
Militant·e·s de la Fédération Anarchiste (FA) francophone, nous dénonçons sans équivoque les scandaleuses attaques, en Espagne, de la CNT-CIT à l’encontre de la CNT-AIT.
Il est que la CNT (Confédération Nationale du Travail) dite « AIT », organisation anarcho-syndicaliste espagnole affiliée à l’AIT (Association Internationale du Travail), est actuellement trainée devant la justice bourgeoise par une autre organisation syndicale parente : la CNT dite «CIT » (CNT-e), affiliée à la CIT (Confédération Internationale du Travail) qu’elle a cofondé après avoir été exclue de l’AIT en 2016 et scissionné, en conséquence, de la CNT-AIT.
Il s’avère en effet que la CNT-CIT s’est lancée en guerre, non pas contre l’État et le Capital, mais bien contre… son homologue : une organisation syndicale bel et bien anarchiste avec laquelle, il y a encore moins de dix ans, elle ne formait qu’une seule et même structure ! Si la situation n’était pas assez farfelue comme cela, les moyens mis en œuvre sont, eux, tout bonnement délirants.
En essence, la CNT-CIT accuse la CNT-AIT d’usurper une identité qui leur appartiendrait et de chercher à tromper les syndicalistes. Elle entend alors obliger la CNT-AIT à cesser d’utiliser la dénomination « Confédération Nationale du Travail », le sigle « CNT », ses signes distinctifs (drapeaux et logos) et son emblème historique (Hercule combattant le lion de Némée). Mais là, point de « résolution à l’amiable ».
Pour ce faire, la CNT-CIT invoque la « propriété privée » après avoir enregistré le tout comme «marques nationales déposées » auprès de l’Office des brevets et des marques. Pour faire entendre ce « droit », elle en appelle à un tribunal bourgeois (l’Audience nationale) pour intenter à la CNT-AIT un procès qui lui permettrait de réclamer individuellement jusqu’à 50 000 € d’intérêts à plus d’une trentaine de syndicats incriminés pour de prétendus « préjudices moraux ».
Il va sans dire qu’aucun des différents syndicats de la CNT-AIT n’est en mesure de régler une somme aussi colossale. Cette affaire, qui risque bien de décimer l’organisation, pourrait même voir des collègues syndicalistes être condamné·e·s à des amendes extrêmement lourdes, voire même à des peines d’emprisonnement. Voilà qu’en ce moment même, les compagnon·e·s madrilènes se retrouvent maintenant menacés d’expulsion du local historique de la place de Tirso de Molina, dans le centre de Madrid ! Et ce n’est que le début de l’offensive…
Il est évident que ces manœuvres juridiques ne cherchent pas seulement à priver la CNT-AIT de son patrimoine et de son héritage. Elles entendent surtout l’enterrer sous des indemnisations faramineuses et, en définitive, la faire totalement disparaitre, réquisitionner ses locaux et s’imposer — de façon aussi hégémonique que fallacieuse — comme seule organisation « anarcho- syndicaliste » du pays.
Nous n’aurions même pas à nous positionner sur les motifs de divergences idéologiques qui séparent les deux organisations syndicales, tant la situation est aberrante ! L’objet de notre soutien s’impose de lui-même : quels que soient les arguments de la CNT-CIT, rien ne justifierait d’avoir recours à la justice bourgeoise pour raqueter la CNT-AIT en invoquant son droit à une absurde « propriété privée ». Comble de l’ironie, pour une organisation qui se revendique pourtant anarchiste ! Il s’agit là de violences politiques et économiques que nous ne pouvons cautionner, tant sur le fond que sur la forme.
Il nous faut tout de même faire la part des choses en distinguant, d’une part, la responsabilité de la direction de la CNT-e comme de la CIT, et d’autre part, celle des militant·e·s qui y sont fédéré·e·s. Néanmoins, qui d’autre que les militant·e·s de la base, dans leur·e·s sections d’entreprise, dans leurs unions locales, dans leurs syndicats et fédérations respectif·ve·s, pourraient bien empêcher leurs directions de se livrer à telle folie ?
Certain·e·s pourraient préférer ne pas se positionner dans ce qui pourrait leur paraître une « simple guerre de paroisses », voire ne pas se sentir concerné·e·s par ce « problème espagnol » — en dépit de l’internationalisme qui est nôtre depuis les prémices mêmes de notre mouvement.
Pourtant, cette situation nous paraît d’une gravité certaine. Ces attaques de la CNT-CIT, en totale contradiction avec les principes anarchistes dont elle prétend être animée, ne sont pas seulement un affront à l’histoire et à l’héritage de la CNT espagnole. Plus vil encore, ces manœuvres à peine dignes des pires syndicats collaborationnistes, mues par la soif de pouvoir et la cupidité de la direction, finissent par jouer le jeu de l’État et du Capital : mains dans la mains pour mettre à genoux tant la CNT-AIT que des militant·e·s syndica·ux·les sincèrement et résolument impliqué·e·s dans les luttes économiques et sociales.
C’est pourquoi nous espérons que ces agressions contre les compagnon·e·s de la CNT-AIT espagnole cessent et critiquons celleux qui continuent à cautionner ou justifier les actions absolument indéfendables de la CNT-CIT espagnole.
Ne fermons pas les yeux sur cette situation sinistre et faisons preuve de l’entraide et solidarité qui sont de mise, à fortiori à l’égard d’une organisation résolument anarchiste et légitimement héritière de la CNT de la Révolution espagnole !
Ainsi, nous appelons toutes les organisations, groupements et individus, anarchistes comme syndicalistes, à exprimer un soutien ferme et résolu aux compagnon·e·s de la CNT-AIT espagnole, pour que cessent définitivement les odieuses attaques de la CNT-CIT !
Nous invitons, à plus forte raison, nos compagnon·e·s militante·s de la CNT-f francophone à nous rejoindre et dénoncer ces agissements ouvertement anti-anarchiques de la principale organisation de la CIT, structure à laquelle ielles viennent tout juste de se fédérer.
Soutien aux compagnon·e·s anarchistes de la CNT-AIT espagnole !
Longue vie à l’anarcho-syndicalisme !